Hot! NGNAOUSSI ELONGUE Cédric Christian

NGNAOUSSI ELONGUE Cédric Christian

J’ai rencontré Christian lors du boot-camp organisé à Dakar par Ashoka Sahel. Quelques jours après la fin de notre formation intensive ; avant son départ pour l’Egypte, Christian me retrouvait à la Boite à Idée, notre espace situé à Mermoz. Je voulais absolument lui faire découvrir ce lieu, dont je lui avais tant parlé. C’était aussi l’occasion d’échanger davantage autour de son expérience et de ses projets…

Qui es-tu ?

«  Je me nomme NGNAOUSSI ELONGUE, je suis camerounais, d’origine Mbô mais à l’identité afropolitaine. Je suis à l’Université Senghor à Alexandrie en Egypte où je travaille sur la promotion du livre pour enfants/ Ce travail est en lien avec mes activités professionnelles au sein du RIPAO. (Réseau International pour la promotion de l’Art Oratoire en Afrique, dans les Caraïbes et le Pacifique, dont je suis le Président). La mission ultime de ce réseau est d’utiliser l’art oratoire comme outil de développement pour l’Afrique et la jeunesse est une de nos cibles prioritaires.

Je me définis comme étant Afropolitain. C’est un concept de l’historien camerounais Achille Mbembe, qui renvoie à toute personne qui ne se considère pas comme appartenant à un pays ou une zone géographique précise, mais dont l’identité est plurielle et métisse»

 

Ngnaoussi Elongue Cédric_Bibliotheca Alexandrina

 

L’art oratoire

« J’ai toujours eu cette passion pour l’enseignement et la transmission des savoirs. Mes années universitaires m’ont permis de mieux murir cette passion. L’art oratoire est pour moi le moyen idéal pour canaliser et catalyser l’ensemble de mes désirs et passions. Désir de contribuer de manière active et pleine à l’amélioration d’une Afrique digne et prospère. Et les enfants sont le terrain le plus sur sur lequel il faudrait investir. Nous devons leur donner une bonne éducation pour en faire des citoyens responsables et conscients des enjeux de la mondialisation. Si nous voulons construire une Afrique meilleure nous devons miser sur eux.

L’amour du Livre

« Je suis une formation en Gestion des Industries Culturelles à l’Université Senghor et mes recherches portent sur la promotion du livre pour enfants. En effet, j’ai toujours été écœuré par un préjugé datant de l’époque coloniale mais qui demeure fatalement vrai : « Les Noirs ne lisent pas et demeureront toujours nos esclaves » ou « Si tu veux cacher un trésor à un Noir, il faut le mettre dans un livre et il ne le trouvera jamais ». Les principales lectures d’un jeune africain sont des lectures scolaires réalisés le plus souvent sous l’effet du contrôle parental ou académique. Alors comment inciter, susciter et maintenir un amour du livre et de la lecture ludique auprès des jeunes ? Comment amener un jeune à développer son gout de la lecture au point de pouvoir se séparer de la télévision pour le plaisir de lire un bon livre. Si cela est possible dans les sociétés occidentales, c’est qu’on peut également le faire : la raison étant universelle ! D’où ce projet de promotion numérique de la littérature de jeunesse car cet amour du livre et de la lecture doit naitre dès notre plus tendre enfance. Dans les sociétés occidentales, il y’a des livres pour enfants de 6 mois, de 2 ans, de 5 ans…

Au fur à mesure que l’enfant grandit, des livres sont là avec des récits pour l’accompagner dans la construction de son imaginaire et de sa représentation du monde. Ce n’est malheureusement pas le cas chez nous, nos parents ainsi que le politique pensent toujours que le livre est l’apanage du monde occidental, et que l’oralité est l’apanage de la société africaine. C’est faux ! L’oralité et l’écriture sont les caractéristiques de toutes les civilisations au monde.  Comment un jeune camerounais pourrait-il pleinement apprécier le style de Mongo Béti, s’il n’a pas été initié par des lectures antérieures ? Permettre à chaque enfant d’avoir accès à un livre africain avec des héros africains pour une meilleure construction de son imaginaire : tel le projet académique que je poursuis actuellement ! Africa Gawlo, projet professionnel conçu par un ainé, en est l’une des ramifications pratique à travers la production et la diffusion d’une émission télévisée de jeux oratoires sur le livre destiné aux enfants de 12-25 ans de la ville de Douala.

 

SAMSUNG CAMERA PICTURES

 

Ashoka Sahel

«  Avec le RIPAO, nous avons développé un programme destiné à la jeunesse qui se nomme Africa Gawlo. (Gawlo signifie Griot en wolof). Nous proposons une émission de débat structuré de type éducatif, ludique (animation), compétitif et lucratif. Il est question d’un championnat d’art oratoire télévisé qui commencera au niveau local (Douala), puis aura besoin d’investissements technologiques pour son expansion digitale en Afrique Centrale, en Afrique puis dans le monde. Notre but ultime est de faciliter l’accès au livre chez les jeunes, la promotion de la lecture ludique via l’art oratoire,  la vulgarisation des pratiques orales traditionnelles et modernes grâce aux médias et la promotion de la langue française et de la francophonie. Au-delà de l’art oratoire, le projet présente un caractère social. Il s’agira à travers la publicité, les votes ludiques et les paris engendrés par le championnat de soutenir les meilleurs orateurs dans leurs projets personnels.

La touche originale que nous comptons donner à l’émission est son aspect participatif et transmédiatique (internet-livre-application-tablettes-TV-radio-presse- etc.). Nous donnons la possibilité au public d’interagir en posant des questions aux orateurs. Il s’agit d’une réalisation transmédia soutenue par des applications numériques à mettre régulièrement à jour, vu le flux d’information en circulation. Tout d’abord la plateforme www.africagawlo.com permet à l’audience de visionner, commenter, télécharger, voter en ligne quel que soit le lieu où elle se trouve et l’appareil numérique utilisé. Nous aurons au total deux grands sites. Le site  sera la vitrine sociale et institutionnelle du projet et contiendra les bases de données de motions, accessibles par compte d’abonnement gratuit. Le site commercial  contiendra pour l’instant trois sous-domaines : www.tv.africagawlo.com , www.radio.africagawlo.com , www.press.africagawlo.com . Ces domaines correspondront à la presse, la radio et la télévision en ligne. La radio vient en alternative à la télévision pour les zones à bas débit.  Nous développerons le tout premier logiciel gestionnaire de championnats d’art oratoire, qui sera multilingue et pourra concurrencer l’application unilingue la plus utilisée au monde : Tournaman. Notre application AfricaGawlo permettra aux internautes d’avoir facilement accès aux ressources audiovisuelles partielles (gratuites) ou totales ([streaming] payantes) de l’émission Africa Gawlo. Il s’agit par exemple des règles de jeu, des lauréats, de l’actualité sur les éditions d’Africa Gawlo.

 

Christian Elongue_Forum Entreprendre dans le Livre_Mois des Cultures d'Afrique (avec Hilaire Penda)

 

C’est donc par rapport à ce projet que j’ai été sélectionné parmi les vingt entrepreneurs sociaux du programme organisé par Ashoka Sahel et American Express. Ici au Sénégal, j’ai rencontré d’autres entrepreneurs, d’autres jeunes leaders qui avaient la même vision de l’Afrique que moi. Ce fut une expérience inoubliable, qui se poursuit d’ailleurs. C’est mon premier séjour à Dakar, ville cosmopolitaine où l’on rencontre des individus provenant d’horizons divers mais qui évoluent en symbiose.

 Des sources d‘inspiration dans la littérature ?

« Dans la littérature africaine, mes sources d’inspirations sont multiples mais je m’en limiterai aux plus importants. Le premier est sans aucun doute le poète martiniquais Edouard Glissant dont la philosophie contenue dans Introduction à une Poétique du Divers (2005) profondément révolutionner ma perception du monde. Ensuite, le pédagogue Burkinabè Joseph Ki-Zerbo qui m’a fait comprendre l’importance de l’éducation et du développement endogène pour l’Afrique. C’est de lui que j’ai hérité mon humilité scientifique. Cheikh Anta Diop, ce monument de la pensée africaine va développer mon intérêt pour la transdisciplinarité et enfin Mongo Béti, le voltaire camerounais a façonné mon indisciplinarité.

Une œuvre qui te représente ?

« C’est difficile, je suis bibliophile. Mais je me retrouve pleinement dans L’Absurde d’Albert Camus. Et c’est d’ailleurs cette philosophie de la vie que j’ai adoptée. J’entre donc difficilement dans les grilles d’analyses ordinaires car mes réactions sont parfois très imprévisibles et en total déphasage avec l’environnement. J’aime avoir une pensée libre et une identité rhizome, loin du piège de la Peau Noire et des masques Blancs fanonien. S’il m’était permis d’ajouté une œuvre, je citerai Sortir de la Grande Nuit, de l’historien politique camerounais Achille Mbembè dont je suis l’évolution de la pensée et dont les analyses cadrent avec ma vision de l’Afrique. Cet ouvrage ainsi que bien d’autres, (Axelle Kabou) m’ont permis de prendre conscience de ce que l’Afrique à ce jour demeurait assise sur les strapontins du bateau de la mondialisation et que c’était à nous, la jeunesse, de la relever et de la rendre fière et prospère.

 

Christian Elongue_Université Senghor

 

Ou te vois-tu dans une dizaine d’année ?

«  Je rêve beaucoup, je rêve grand, je rêve loin. Je rêve tellement que mes rêves me donnent des frissons. Mais je rêve toujours car mon leitmotiv c’est Rêver, Oser, Bosser. C’est pourquoi je me projette Professeur des Universités dans une dizaine d’année. Je sais le chemin sera long et pénible mais j’ai la dose de motivation et de détermination qu’il faut. Chez nous au Cameroun, l’on a coutume de dire : La vraie magie c’est le travail ! Ma vision c’est de pouvoir impacter le Cameroun, l’Afrique et le Monde à travers la transmission des savoirs. Peu importe mon positionnement géographique, je veux exercer une profession où je serai au contact avec des gens, pouvoir échanger, communiquer et changer les mentalités. Cela est un devoir pour moi car la prise de connaissances entraine la prise de conscience et de là découle la révolte et une volonté de changer le système établi.

Un mot de la fin :

« Peu importe d’où on vient, peu importe où on va, c’est au niveau de notre imaginaire que nous devons apprendre à accepter l’autre. Le monde aujourd’hui souffre d’un seul mal : la différence. Nous refusons d’accepter et de vivre avec l’autre d’où la nécessité de développer une Poétique de la Relation dans une ère Afropolitaine »

Retrouver Christian sur la toile : www.lafropolitain.mondoblog.org

Lien Réseaux Sociaux :

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Site RIPAO : www.ripao.org

 

 

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