Festival de Jazz a Gorée
Jazz a Gorée
Dimanche, je libère enfin mon après midi pour aller au festival de Jazz à Gorée, dont Wakh’Art était partenaire. Arrivée à l’Embarcadère à 19h, je retrouvais Jean Baptiste Joire, mon ami photographe. Un peu sceptique je dois l’avouer, j’attendais la chaloupe une cigarette au bec. Après plusieurs semaines de mailing à l’agence, impossible d’avoir un planning ou un rendez vous avec les artistes invités sur le Festival.
Enfin la Chaloupe débarquée les passagers, les guichets allaient ouvrir. Dans la chaloupe je vis quelques visages familiers. Arrivée sur l’ile, mon compagnon de route et moi, on s’arrêtait prendre un verre et mangeait un petit plat d’Atieké et de poisson grillé, préparé par une femme d’une cinquantaine d’année, qui était très sympathique. Assis à l’angle d’une rue, éclairée par un lampadaire typique de l’époque coloniale, on dégustait nos plats et discutait avec « la mère ». Au Sénégal, on appel souvent ces femmes mères. Elles pouvaient en effet être nos mères à cause de leurs âges, mais au-delà de çà, elles avaient la gentillesse et la patience d’une mère.
Après ce bon repas, on partait sur le site du Festival. Accueillis dans la caserne des pompiers de l’ile, par de sublimes Signares, on découvrait la scène installée au bord de l’eau, dans la cour de la caserne. Des centaines de chaises étaient installées de çà et là. Quelque unes d’entre elles étaient déjà occupées. On s’assit à peines à quelques mètres de la scène, je ne voulais rien rater du spectacle. J’attendais depuis des semaines le set d’Oumou Sangaré. Au point que je ne savais même pas par quoi aller commencer le concert.
Je compris aux vas et viens des techniciens que le groupe Milim, qui avait ouvert la soirée, venait de descendre de scène. Mince! j’avais raté Jeannot Mendy! Quelques minutes plus tard, Mr Sow, Ministre du Tourisme et des transports aériens entamait un discours, et remerciait les organisateurs du Festival pour ce « weekend fabuleux », ainsi qu’Alioune Wade, musicien à l’initiative de cet évènement. Il insistait sur l’importance de la pérennisation de ce type d’ évènement. Mr le Ministre souhaitait également que demain, cet événement devienne un « incontournable de la mise en avant de la culture sénégalais. » Mr Sow appréciait ce type de produit touristique « viable ». Il ajoutait et clôturait sur « l’importance du soutient des mécènes, des sponsors et des différents ministères. »
Peu de temps après, les seize percussionnistes de la troupe de Mbaye Dièye Faye montaient sur scène. Ils étaient impressionnants. Vêtus de leurs plus beaux costumes, et de leurs instruments, ils ouvraient leurs performances, dirigés par Mbaye Dièye Faye dans le rôle du chef d’orchestre. La symphonie de percussions devait surement retentir dans toute l’ile. La parfaite synchronisation des musiciens rendaient le spectacle fantastique. Les rythmiques montaient crescendo. Je me retrouvais dans la pure tradition sénégalaise.
Mbaye Dièye Faye improvisait parfois, sous les éclats de rires du public admiratif. Bientôt, le groupe chantait et dansait, comme pris par le rythme. Les jeux de scène s’enchainaient, je ne voyais pas le temps passer. Trois des musiciens faisaient un pas un avant et proposaient maintenant un exercice asses difficile. Accompagné par le chef d’orchestre ils jouaient des deux mains, de l’avant bras et du coude. J’étais admirative. Comment faisaient-ils pour produire un tel son ?
Plus tard, Mbaye Dièye Faye invitait Habib Faye sur scène et le remerciait pour son talent et sa performance de la vieille, avant d’appeler Mahtar Samb. Le musicien de renom, pris possession de la batterie. Son instrument ajoutait un je ne sais quoi à ce chœur de percussion déjà asses surprenant. Des enfants de six ans montaient maintenant sur scène et se déhanchaient aux sons des percussions, qui peu de temps après clôturaient le spectacle sous un tonnerre d’applaudissement…
Les techiniciens reprenaient possession de la scène, ils changeaient quelques câbles de çà et là. Quelques minutes plus tard, un musicien du nom de Cheikh Tidiane Seck, montait sur l’estrade. Il s’installait devant un clavier et jouaient quelques notes. Son talent était incontestable. Il jouait et chantait en même temps… c’était magnifique, il aurait pu faire le concert à lui seul. Mais il appelait déjà un autre musicien, batteur cette fois, puis un troisième qui, lui prenait une cloche et une percussion.
La mélodie se composait sous nos yeux. Le mélange saugrenu mais habille donnait une sonorité rythmée et surprenante. Tout cela sonnait étonnamment bien. Mr Seck en appelait un quatrième, puis arrivait enfin sous un tonnerre d’applaudissement, Alioune Wade. L’artiste remerciait ces musiciens pleins de sagesse et d’expériences, avant l’entrée d’une choriste et d’un chanteur, puis d’un cinquième musicien guitariste. Quelle belle ouverture !
Au première note, j’avais un frisson de plaisir devant cette voix puissante. A eux tous, ils jouaient une délicate harmonie, qui peu à peu montée en énergie… Le chanteur d’origine mandingue et la choriste chantaient et dansaient. Une vague de folle énergie envahissait peu à peu la scène…
L’entrée d’une nouvelle choriste au 5ieme morceaux, puis d’Oumou Sangaré somptueuse, entraînait tous le monde dans une énergie incroyable… Quelle était belle dans sa robe noir revêtue de strass ! La calebasse agrémentée par des coquillages qu’elle faisait claqué dans ces mains ramenait le coté traditionnelle de la musique mandingue. Oumou chantait… Sa voix perçait le silence de la nuit noire. Même les vagues étaient à l’écoute. La Diva comme il l’avait appelé enchainée les morceaux. J’étais éblouie, comme hypnotisée. L’absence de mes amis me sortie de ma contemplation. Qu’ils auraient aimé ce spectacle… Je regrettais le coût des places, très couteuses de ce Festival. Tous auraient du pouvoir assister à cela. La septième chanson était dédiée aux femmes africaines. Oumou Sangaré les remerciait de leurs courages et de leurs forces. Je pensais à ma mère et mes tatas qui restent des exemples pour moi au quotidien. Le public dansait. Elle y était arrivée. Tous étaient debout et imitaient les pas de la Diva.
Le spectacle se finissait. Les gens se précipitaient vers le quai, de peur de rater la dernière chaloupe. J’avais des étoiles dans les yeux. Sur le bateau, je croisais Mboupy, le chef logistique de Wakh’artMusic, notre label, qui faisait partis une fois de plus, du staf technique. Il me prit par le bras et m’invita à saluer les artistes. J’étais comme une petite fille, impressionnée. Je croisais l’une des organisatrices. Je profitais de l’instant pour lui rappeler que j’attendais mes rendez vous, pour les interviews avec les différents artistes, comme convenus il y’a des semaines de çà. Elle me fit comprendre que je devais m’adresser à Alioune Wade directement… Chose que je fis. Malheureusement, pour différentes raisons hors de mon contrôle, ces interviews n’eurent jamais lieu. Triste et quelque peu deçu par le manque d’organisation de Crescendo, je m’en retournais vers de nouvelles aventures culturelles, persuadée que la vie me rendrait ces moments volés.